Récepteur des œstrogènes
Les récepteurs des œstrogènes sont des protéines de la superfamille des récepteurs nucléaires, famille des récepteurs des stéroïdes, liant naturellement les œstrogènes, qui sont les principales hormones stéroïdes sexuelles féminines dans l'organisme.
Les récepteurs des œstrogènes (ER) sont des protéines de la superfamille des récepteurs nucléaires, famille des récepteurs des stéroïdes, liant naturellement les œstrogènes, qui sont les principales hormones stéroïdes sexuelles féminines dans l'organisme.
Historique
Les récepteurs des œstrogènes furent originellement conceptualisés par Elwood V. Jensen à l'Université de Chicago à la fin des années 1950[1] ce qui lui valut d'être corécipiendaire du Prix Lasker en 2004. Il s'agissait à l'époque de la première identification d'un récepteur des hormones stéroïdes.
Structure
Les récepteurs ERα (ESR1, NR3A1) et ERβ (ESR2, NR3A2) sont deux protéines structurées par cinq régions communes à l'ensemble des récepteurs nucléaires. Ces régions sont appelées A/B, C, D, E et F et participent à la formation des domaines fonctionnels : le domaine N-terminal possèdant des fonctions de transactivation, le domaine de liaison à l'ADN (ou DBD), le domaine de dimérisation, le signal de localisation nucléaire (ou NLS) et le domaine de liaison du ligand (ou LBD). ERβ est plus court de séquence en acides aminés que ERα mais tous deux possèdent une similarité de structure dans les domaines DBD et LBD.
- Le domaine N-terminal (domaines A et B)
La région A/B constituant le N-terminal des ERs est impliquée dans des interactions protéine-protéine et participe, par le recrutement de, à l'activation et l'expression des gènes cibles de l'
- Le domaine de liaison à l'ADN (domaine C)
Il correspond à la région C, qui est presque idéalement conservée entre ERα et ERβ, et joue un rôle essentiel dans la dimérisation et la fixation du ER à l'ADN. Ce domaine d'environ 60 acides aminés repliés en une forme globulaire contenant deux hélices α (dissemblables par leurs séquences) perpendiculaire l'une sur l'autre et contenant chacune quatre résidus cystéines liant une atome de zinc par coordination : cette liaison forme deux régions en doigt de zinc qui portent les fonctions de fixation des récepteurs ERs à l'ADN.
Le DBD peut être défini par deux sous-domaines, différents par leurs structures et leurs fonctions. Le premier contient une boîte dite proximale ou P-box impliquée dans la fixation à l'ADN grâce à son interaction directe avec l'ADN au niveau des éléments de réponse des ERs nommés estrogen responsive elements ou ERE. Le deuxième sous-domaine du DBD contient une boîte dital ou D-box impliquée dans la dimérisation de deux molécules ER. La séquence P-box est semblable entre le ERα et le ERβ ce qui explique que ces deux récepteurs fixent sur l'ADN par même affinité et spécificité. L'élément de réponse ERE est une répétition de la séquence 5'-AGGTCAnnnTGACCT-3' (n correspond à n'importe quelle nucléotide). La séquence de D-box est différente entre les récepteurs et permet leurs dimérisation «head to head» grâce à complémentarité de structure ainsi qu'à des contacts entre les DBD impliquant les résidus Met42, Thr46, Thr50, et Ser58 du ER.
- La région charnière ou hinge (domaine D)
La région D est faiblement conservée et correspond à une région charnière flexible constituée d'un ensemble d'acides aminés basiques faisant le lien entre le domaine C et le domaine de liaison du ligand (domaine E/F). Elle contribue à la spécificité et la polarité de la fixation du récepteur à l'ADN. Ce domaine change de conformation après fixation du ligand et contient des sites de modification post-traductionnelle (telle que l'acétylation et une séquence de localisation nucléaire NLS qui permet au récepteur de migrer dans le noyau cellulaire.
- La région C-terminale (domaines E et F)
La région C-terminale des ERs est essentiellement constituée du domaine E, qui est à la fois le domaine de fixation du ligand, ou LBD (Domaine de liaison au ligand) et le site de la fonction de transactivation AF2. Le domaine E comporte aussi des régions impliquées dans la dimérisation des récepteurs. Sur le plan biochimique, le domaine E est structuré en une succession de douze hélices alpha amphipatiques (notées H1 à H12) scindées les unes des autres par des feuillets β. En absence de l'
Mécanismes d'action
Deux modes d'action principaux des ERs sont décrits : la voie génomique et la voie non-génomique.
- La voie génomique, la plus classique et la mieux connus, correspond à la situation où les ERs agissent comme des, à savoir lorsqu'il s se fixent au niveau des séquences régulatrices des gènes œstrogéno-régulés pour moduler leur expression. On parle de voie génomique directe ou indirecte selon que le récepteur se fixe directement sur les séquences d'ADN régulatrices ou via une interaction avec d'autres facteurs de transcription tels que les protéines AP-1 ou Sp1.
- Les voies non-génomiques correspondent aux effets des ERs sur les voies de signalisation intra-cellulaires, surtout calcium-dépendantes. Ces effets peuvent d'ailleurs se traduire aussi sur la régulation de gènes. En effet, de nombreuses cascades de signalisation influencent l'expression génique par l'intermédiaire de leurs composantes nucléaires.
Fonctions
Les récepteurs nucléaires des œstrogènes ERα et ERβ sont impliqués dans de nombreux processus physiologiques, surtout la fonction de reproduction, autant chez le mâle que la femelle. L'invalidation du récepteur ERα conduit par exemple à la stérilité des souris femelles et mâles. À des degrés divers, les ERs exercent des fonctions au niveau du dispositif nerveux central, du foie, des vaisseaux sanguins, du dispositif immunitaire, des tissus adipeux et osseux.
Physiopathologie
La principale pathologie liée à un dérèglement du fonctionnement des œstrogènes et leurs récepteurs est le cancer du sein hormono-dépendant. En effet, près de 60% des tumeurs cancéreuses mammaires présentent originellement une croissance dépendante des œstrogènes. Par contre, tandis que les effets prolifératifs des œstrogènes semblent clairement impliquer ERα, ERβ exercerait plutôt des effets anti-prolifératifs. Paradoxalement, les tumeurs ERα-positives sont fréquemment moins invasives que les tumeurs ER-négatives et leur pronostic est de fait le plus souvent meilleur. Les tumeurs œstrogéno-dépendantes affectent aussi d'autres organes, surtout l'utérus (endomètre).
Bien que cela reste à démontrer clairement, les récepteurs ERα et ERβ seraient impliqués dans certains effets protecteurs des œstrogènes dans des maladies neuro-dégénératives telles que la maladie d'Alzheimer, mais aussi suite à certains accidents vasculaires cérébraux. Cependant, la découverte récente d'un troisième récepteur transmembranaire des œstrogènes[2] de la famille des récepteurs couplés aux protéines G, GPR30, complexifie le mécanisme d'action des récepteurs impliqués dans ces effets. De plus, GPR30 semble spécifiquement abondant et actif au niveau du dispositif nerveux central.
Références
- ↑ The estrogen receptor : a model for molecular medicine, Jensen EV, Jordan VC, Clin. Cancer Res. 2003;9, 6 :1980-9.
- ↑ A Transmembrane Intracellular Estrogen Receptor Mediates Rapid Cell Signaling Chetana M. Revankar, Daniel F. Cimino, Larry A. Sklar, Jeffrey B. Arterburn, Eric R. Prossnitz, Science, 11 March 2005 :vol. 307. no. 5715, pp. 1625-1630.
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